Des aigles aux loups, il n'y a qu'un pas ! C'est en revenant dans les Alpes pour réaliser un rêve d'enfance, celui de filmer des aigles dans leur environnement naturel, que Jean-Michel Bertrand a l'intuition que le loup, cet animal légendaire, pourrait bien être là, quelque part autour de lui. Le loup, un animal qui interroge, dérange et fait rêver. Cette idée devient vite une obsession pour ce réalisateur aventurier et enquêteur qui nous offre un documentaire haletant et puissant. Les péripéties sont contées par l’auteur lui même, qui lie voix off et commentaires pour finalement nous livrer une légende des Alpes. Les loups, acteurs d’un véritable mythe des montagnes, deviennent aussi mystérieux qu’inaccessibles. Une situation compliquée qui ne freine pourtant pas ce baroudeur des montagnes, qui se transcende pour voir ces animaux dans leur vie sauvage, grâce à sa patience et à une démarche très respectueuse de la nature.

La vallée des loups n'est pas un documentaire animalier comme on en produit et diffuse à la chaîne. C'est un vrai film de cinéma, avec un point de vue et des choix de mise en scène. Un documentaire peut aussi avoir ses personnages. La route du cinéaste est ponctuée de rencontres toutes plus insolites les unes que les autres : chouettes et chevaux deviennent ainsi ses compagnons d’aventure. Aidé de ces drôles d’acolytes, l’auteur trace ses itinéraires sur un simple carnet à dessin, et pointe des lieux pour bivouaquer d’une croix comme sur une carte au trésor. Jean-Michel Bertrand a la force d’un chasseur et la ruse d’un renard : pour être au plus près de l’animal, il faut en devenir un et marquer son territoire. Pas question pour Jean-Michel Bertrand d'opter pour la facilité et d'aller filmer des loups dans des parcs ou des réserves. Faire un film sur la liberté, cela ne se fait pas au détriment de l'honnêteté et d'une certaine éthique pour ce cinéaste qui se refusera à nous révéler le lieu où se trouve la tanière. Le film est brut et donne à voir ces animaux et cette vallée le plus spontanément possible. Les paysages majestueux et simples à la fois prennent le relais sur les commentaires du réalisateur, eux même accompagnés de la subtile musique d'Armand Amar.

Le documentaire prend finalement le parti des loups. Par sa position, il nous pousse à nous questionner sur le rapport de l'homme à l'environnement. Une véritable fable pour la nature, par la nature qui nous transporte.